Sommaire de l’épisode
Cette semaine nous remettons en question certains a priori avec Arnaud Tonnelé. Un entretien qui risque fort de changer votre perspective sur l’agilité et la performance des équipes. Et pour ceux qui pensent vraiment que le monde est de plus en plus VICA, écoutez attentivement!
Nous abordons les questions d’équipes auto-organisées, d’intelligence collective et de prise de décision dans un contexte où la vitesse peut être un avantage concurrentiel.

Arnaud Tonnelé
Arnaud Tonnelé est coach exécutif, coach d’équipe et d’organisation chez Kea & Partners à Paris. Il est l’auteur de plusieurs livres dont « Comment réussir à se planter plus vite et plus efficacement », « 65 outils pour réussir le changement individuel et collectif » et « La bible du team building ».
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Détails de l’épisode
(00:00) Bienvenue à l’épisode 62
- Entretien avec Arnaud Tonnelé.
(01:02) Équipes auto-organisées
En Agilité, on se fie à des équipes auto-organisées. Parlez-nous de ce concept d’équipes auto-organisées: comment les rassembler et comment les soutenir?
- L’auto-organisation est un principe plus ancien que la hiérarchie. Par exemple les groupes d’amis.
- La hiérarchie reste une solution pour résoudre les questions de divergence au sein d’un groupe. Mais il existe plusieurs types de règles pour résoudre ce même problème.
- Donc au cœur du groupe, ou de l’organisation, la question centrale est plutôt celle-ci : comment décide-t-on ?
(04:33) Le contexte de l’agilité
Est-ce possible de diffuser ce concept ailleurs qu’au sein des équipes projet, dont le but et les livrables sont faciles à identifier, à rappeler ?
- Je ne vois pas ce qui empêche d’adopter ces principes, bien au contraire.
- Avec l’agilité, on a un peu l’impression d’avoir trouvé le Graal. Mais c’est en réalité un ensemble de principes de bon sens :
- Ras le bol des tunnels, ras le bol d’avoir perdu de vue les clients;
- Revenir à des choses simples : les personnes et leurs interactions;
- Réaliser des choses opérationnelles, soyons dans le concret;
- Adaptons-nous sans cesse au changement;
- Continuons un travail main dans la main avec le client.
- Donc demandons-nous plutôt comment avons-nous perdu de vue ces éléments, plutôt que de penser que nous avons découvert comment travailler.
- De manière conjoncturelle, le modèle libéral a transformé l’actionnariat en un actionnariat volatil et financier. La pensée de Fayol et de Taylor s’est imposée dans un environnement où la prime allait vers l’avantage concurrentiel et la taille. Mais le monde a changé et la prime est dorénavant à la vitesse d’exécution, d’où cette fascination pour l’agilité.
- Il y a un paradoxe aujourd’hui: on paye plus cher pour des produits qui sont « sans ceci, sans cela ». L’agilité, c’est un peu la même chose: on travaille « sans ceci, sans cela ».
(11:58) La performance des équipes
Vous êtes aussi un expert en coaching d’équipe. Comment mesure-t-on la performance d’une équipe ? Comment savoir si une équipe sous-performe, performe ou surperforme ?
- Cette question de performance d’équipe m’intéresse assez peu en fait. Parce qu’une équipe qui performe ou sous-performe, ça se voit tout de suite ! Mais on peut utiliser 2 indicateurs: l’équipe livre-t-elle ce qu’elle s’est engagée à livrer ? L’autre, un peu plus subjectif, concerne la qualité des relations, de l’atmosphère, de l’ambiance.
- Une équipe c’est un mélange d’objectif (la dimension métier) et de subjectif (la dimension relationnelle). Comme le 2e aspect est plus difficile à qualifier et à quantifier, on met peu d’énergie de ce côté et au fil du temps il peut se détériorer et ça se répercute sur la performance objective. Il faut donc équilibrer l’attention portée aux deux aspects.
- On doit devenir à l’aise avec «ce qui compte parfois ne se compte pas» et «ce qui se compte parfois ne compte pas». S’assurer qu’il y ait de la clarté sur les livrables et les objectifs de performance collective tout autant que de la clarté sur la qualité des relations et sur les processus subjectifs.
- Donc pour répondre à la question: observer, certainement, mesurer, pas obligatoirement.
(17:11) Intelligence collective
Vous parlez aussi d’intelligence collective dans votre dernier livre. Pouvez-vous nous expliquer ce concept et partager avec nos auditeurs des bonnes pratiques ?
- L’intelligence collective est sans doute le concept central du 21e siècle.
- La première des intelligences artificielles, c’est justement l’intelligence collective. Elle est infiniment coûteuse et moins complexe que l’autre, celle informatique.
- 1+1 = moins que 2 si l’équipe est mauvaise et plus que 2 si elle est bonne.
- La performance du groupe = somme des talents individuels + la qualité de leur maillage. Si les individus ne s’entendent pas, ils passent une partie importante de leur temps et de leur énergie à résoudre des problèmes de relations plutôt que de s’investir dans des activités plus importantes pour le groupe. Et l’inverse: ensemble on sera plus créatifs, plus performants.
- La question de la taille de l’équipe est importante. L’individu est capable d’avoir des relations avec 100 ou 120 personnes. Au-delà, ça devient difficile. Donc si une organisation dépasse cette limite, on devrait la redécouper.
- Une équipe, c’est 8 à 12: en deçà, les interactions sont en nombre trop faible, et au-delà, elles sont trop nombreuses et on enlève de l’engagement ou on crée de la friction additionnelle dans ces interactions.
(23:55) Le monde est-il vraiment VICA?
Les problèmes auxquels nos organisations font face sont de plus en plus complexes, ou du moins me le semblent. Comment conseillez-vous vos clients face à ce monde VICA ? Qu’est-ce qui vous intéresse en termes de management dans ce monde post-Covid-19 ?
- Inversons plutôt la question: y a-t-il un moment dans l’histoire où les humains ont eu l’impression de vivre dans un monde simple, prévisible, certain et clair ?
- Les crises des dernières années ne semblent pas être plus ou moins prévisibles que celles des années ou des siècles passés. Il faut se méfier des mots : le langage crée la réalité qu’il nomme. Je ne peux pas affirmer que le monde est vraiment plus ou moins VICA qu’avant.
- Quelque chose a changé : le niveau d’éducation. Emmanuel Todd nous dit ceci: on a une hausse du niveau d’éducation moyen, mais une baisse du niveau d’éducation des couches supérieures. Donc les élites perdent dans leur capacité de comprendre le monde: perte de capacité anthropologique, sociologique, géopolitique par exemple.
- On a probablement perdu des savoirs qui nous aident à apprendre à raisonner, voire à apprendre à apprendre.
(32:23) Conseils aux dirigeants
Un conseil aux cadres, entrepreneurs et dirigeants, à part celui de lire un livre !
- Inviter les managers, les entrepreneurs, les dirigeants à repenser leur rapport au temps.
- Dégagez-vous du temps pour vous pour réfléchir, pour refroidir, pour observer, pour dialoguer, pour vous former ! Si une équipe n’arrive pas à fonctionner sans son dirigeant, c’est problématique, donc ce temps additionnel pour vous ne vous fera pas perdre grand-chose, bien au contraire: il ou elle pourra redistribuer ces apprentissages, ces réflexions.
- Le temps est la seule ressource équitablement répartie parmi tous les humains. Que faites-vous du temps que vous avez ?
- Ralentissez !
(36:56) Conclusion
Ressources
Coordonnées
Podcast
Livres
- Comment réussir à se planter plus vite et plus efficacement (A.Tonnelé, 2020)
- La bible du team building: 55 fiches pour développer la performance des équipes (A.Tonnelé, 2015)
- 65 outils pour accompagner le changement individuel et collectif (A.Tonnelé, 2011)
- Équipes autonomes: Guide de mise en œuvre (A.Tonnelé, 2007)